Forêts alluviales à Alnus glutinosa et Fraxinus excelsior
Définition et références phytosociologiques
Ces forêts sont riveraines des cours d’eau planitiaires et collinéens de l’Europe tempérée et boréale. Les sols sont riches en dépôts alluviaux et périodiquement inondés par les crues annuelles, mais bien drainés et aérés pendant les basses eaux.
Aulnaie-frênaie ombragée à Laîche espacée et Laîche pendante, ajourée à Houblon et Liseron des haies.
Carici remotae-Alnetum glutinosae Lemée 1937. Querco-Fagetea.
Caractéristiques stationnelles
Ce type d’habitat est installé au niveau des sources, des ruisselets et des rivières, sur alluvions argileuses, limono-argileuses ou sablo-limoneuses. Le sol présente un horizon supérieur riche en matière organique avec cependant une bonne activité biologique de minéralisation. Le profil présente, à une profondeur variable, une nappe permanente circulante.
Physionomie et structure
Les peuplements linéaires de ces forêts de berges sont dominés par l’Aulne glutineux dans les parties bas-ses et par le Frêne commun dans les parties hautes. Le Chêne pédonculé apparaît par endroits, sur les banquettes supérieures. La strate arbustive est composée de saules, du Noisetier, de la Viorne obier, du Nerprun bourdaine… Le tapis herbacé est riche en Laîches.
Flore caractéristique, espèces indicatrices
- Aulne glutineux Alnus glutinosa
- Frêne commun Fraxinus excelsior
- Tilleul à petites feuilles Tilia cordata
- Chêne pédonculé Quercus robur
- Nerprun purgatif Rhamnus cathartica
- Viorne obier Viburnum opulus
- Dorine à feuilles alternes Chrysosplenium alternifolium
- Fétuque géante Festuca gigantea
- Laîche espacée Carex remota
- Laîche pendante Carex pendula
- Laîche lisse Carex laevigata
- Fougère femelle Athyrium filix-femina
- Osmonde royale Osmunda regalis
- Brachipode des bois Brachypodium sylvaticum
Confusions possibles…
… avec les ormaies-frênaies de vallées larges.
Localisation dans le site
Vallées du Noireau, de la Rouvre et de l'Orne, principalement sur les berges boisées. Habitat assez bien représenté dans le site.
Valeur écologique et patrimoniale
Cet habitat apparaît à chaque fois sur de faibles étendues spatiales, mais peut couvrir un important linéaire de berges. Il ne subsiste généralement que dans les parties forestières des vallées.
Cet habitat complexe offre de multiples niches écologiques à la faune. Il est très important pour la Loutre en tant que zone de repos diurne et pour les gîtes de reproduction. Il est possible d’y observer quelques espèces floristiques peu fréquentes et protégées.
Espèces de l’annexe II de la Directive Habitats
Loutre d’Europe, chauves-souris, Saumon atlantique, Écrevisses à pieds blancs, Chabot, Mulette perlière.
Valeur sociale et économique
Malgré l’exiguïté de l’habitat, une valorisation économique est envisageable avec l’Aulne glutineux, le Frêne commun, l’Érable champêtre ou le Chêne pédonculé selon la situation microtopographique et hydrologique. L’activité de populiculture est envisageable.
Dynamique de la végétation…
… spontanée
Cet habitat présente la possibilité se reconstituer à partir d’une mégaphorbiaie. L’Aulne est l’essence pionnière, subsistant seul dans les stations les plus humides. Le Frêne assure la maturation sur les ban-quettes supérieures, dominant très largement l’Aulne. Le Chêne pédonculé apparaît dans la partie topo-graphique la plus haute, à partir du potentiel de semences représenté par la chênaie pédonculée-frênaie voisine.
… liée au mode de gestion
Du fait de l’exploitation, l’aulnaie à Laîche espacée est devenue rare, souvent remplacée par des peuplements linéaires où les espèces de lumière dominent (Liseron, Baldingère, grandes herbes...).
État actuel de conservation
Le fond de vallée de la Rouvre, non pénétré par un axe routier, possède encore de belles portions de "forêt-galerie", extrêmement rares en Basse-Normandie. Ailleurs, groupement dégradé et souvent linéaire. C’est un habitat prioritaire de la Directive qui mérite une attention particulière.
Menaces potentielles, facteurs de dégradation
Cette aulnaie-frênaie est parfois remplacée par des plantations de peupliers mais, dans la plupart des cas, c’est une gestion trop agressive qui conduit à la suppression partielle ou totale de ces boisements.
Orientations optimales de gestion
(d’après le Muséum National d’Histoire naturelle)Les transformations sont fortement déconseillées. Les moyens doivent être prioritairement orientés vers le maintien d’une vocation feuillue, avec respect du cortège spontané, correspondant au caractère alluvial de ces forêts.
• Respecter, autant que possible, la fermeture du milieu ;
• Proscrire toute opération de drainage, d’autant plus que l’on se situe sur des zones de sources et de ruissellements ;
• Ne pas abattre d’arbres en travers des cours d’eau ;
• Il est recommandé de ne pas laisser de rémanents préjudiciables au cours d’eau (principal et annexes), ni dans les zones inondables. Cependant des apports modérés peuvent procurer des caches pour les poissons, être des supports de ponte pour les poules d’eau, etc. ;
• L’usage de produits phytosanitaires est à proscrire à proximité immédiate des zones d’écoulement (cours d’eau et annexes, réseaux de fossés) ; ailleurs, quand les autres techniques (manuelles et mécaniques) ne sont pas envisageables, ces produits peuvent être utilisés en applications locales et dirigées.