Pelouses sèches

Pelouses sèches semi-naturelles et faciès d'embuissonnement sur calcaires (Festuco-Brometalia)





Code UE :     6210
Code CORINE 1991 :     34.31 à 34.34

Surface couverte :    env. 10,3 ha


Définition et références phytosociologiques


Pelouse à Fétuque ovine et Véronique germandrée, faciès à Brachypode penné
Composition duale, à la charnière du Lino-Gaudinion (Scorsonère) et du Mesobromion (Festuco-Brometea).

Caractéristiques stationnelles


L’habitat est présent aux étages planitiaire et collinéen en climat subatlantique. Ces prairies-pelouses sèches et chaudes sur colluvions calcaires sont localisées sur des roches siliceuses exposées préférentiellement au sud, où les pentes sont plus ou moins fortes. Les sols sont squelettiques, de type rendzine ; ils sont plus rarement bruns, calcaires et peu profonds.
On retrouve sur ces pelouses les systèmes pastoraux extensifs hérités des traditions de parcours ovin. Le pâturage bovin semi-extensif est plus rare. L’action des lapins, souvent intense, est devenue déterminante avec la déprise pastorale jusqu'à l'arrivée de la myxomatose.

Physionomie et structure


Ces pelouses, dont l'aspect général est souvent marqué par les Fétuques, sont rases à mi-rases. Le tapis herbacé est ouvert à plus ou moins fermé selon les phases dynamiques. L’habitat est souvent associé à des formations hautes déjà marquées par les faciès d'embroussaillement à Fétuque de Leman, Brachypode penné, Avoine pubescente, Gaudinie fragile et Crépis à feuilles de pissenlit. Dans les phases plus âgées des pelouses, le Brachypode penné participe de façon complémentaire à la physionomie de l'habitat. La floraison est variée de la fin du printemps au début de l'été (mai-juillet), avec un regain de floraison à l'automne.
En cas de disparition des populations de lapin ou après abandon pastoral, le piquetage arbustif est pro-gressif et les lisières forestières avancent.

Flore caractéristique, espèces indicatrices

  • Fétuque de Leman           Festuca lemanii
  • Brachypode penné           Brachypodium pinnatum
  • Avoine pubescente           Avenula pubescens
  • Gaudinie fragile                 Gaudinia fragilis
  • Véronique germandrée     Veronica teucrium
  • Carthame laineux             Carthamus lanatus   
  • Ophrys araignée               Ophrys sphegodes
  • Orchis bouc                       Himantoglossum hircinum
  • Orchis pyramidal               Anacamptis pyramidalis
  • Ophrys abeille                  Ophrys apifera
  • Orchis brûlé                      Orchis ustulata
  • Orchis bouffon                  Orchis morio


Confusions possibles


… avec des pelouses-ourlets résultant de l'abandon pastoral et de la dynamique de recolonisation pré-forestière, généralement dominés par le Brachypode penné (Brachypodium pinnatum) et constituant les faciès typiques à Brachypode penné ;
… avec des pelouses méso-xérophiles vicariantes dans les régions de contact (Code UE : 6210).

Localisation dans le site


L’habitat est localisé dans vallée de la Laize. Son emprise spatiale est limitée mais il assez bien représenté.

Valeur écologique et patrimoniale


Les pelouses à Avoine des prés et Fétuque de Léman ont une distribution assez large mais sont en régres-sion spatiale intense. Elles présentent une diversité floristique importante, avec notamment une forte richesse en orchidées (nombre d'espèces, taille et variabilité des populations). Ces pelouses sont composées d’autres végétaux rares voire très rares (Véronique germandrée), dont certains sont protégés au niveau régional (Carthame laineux). La diversité entomologique est très élevée, en particulier dans les complexes structuraux mélangeant pelouses et pelouses-ourlets.

Espèces animales typiques de l’habitat


Trochoidea elegans.

Valeur sociale et économique


La valeur économique de ces pelouses est moyenne à très faible pour l’agriculture, selon l’état actuel du milieu. La production fourragère peut être assez bonne dans les meilleurs cas (pente faible, microclimats les moins secs, possibilité d’apport d’engrais). La production annuelle de fourrage est comprise entre 1,5 et 3 tonnes de matière sèche par hectare et par an. Pour les éleveurs bovins, ces secteurs sont particulièrement adaptés au pâturage des génisses et des bœufs. Le pâturage ovin, caprin ou équin est possible. Certains troupeaux de moutons itinérants valorisent encore ces milieux de façon extensive aujourd’hui.
Outre leur valeur économique, ces pelouses ont une valeur organisationnelle sur l’exploitation en offrant des degrés de liberté supplémentaires dans la gestion du troupeau.

Dynamique de la végétation…
… spontanée


L'abandon des pratiques pastorales entraîne l'envahissement par une graminée sociale, le Brachypode penné, puis l'installation d'une friche à Fenouil sauvage et Molène lychnite. La densification par la colonisation du Brachypode penné, ainsi que le piquetage arbustif et arboré progressif aboutissent à la formation de fourrés coalescents ou de complexe pré-forestier.
Au niveau des pelouses elles-mêmes, la phase pionnière est souvent riche en chaméphytes bas. La phase optimale à structure pelousaire horizontale est ouverte et présente donc une niche de régénération fonctionnelle des espèces à vie courte. On observe une perte de la niche de régénération durant la phase de fermeture de la pelouse, une élévation du tapis végétal et une extension d'espèces d'ourlet (en particulier le Brachypode penné) lors de la phase de vieillissement.

… liée au mode de gestion


L’intensification du pâturage, généralement accompagnée d'amendements accrus (situation classique en en-clos herbager, plutôt avec des bovins ou des équins) entraîne une modification de l’habitat qui évolue progressivement vers des variantes piétinées à Pâquerette et Trèfle rampant, puis à des prairies calcicoles pâturées plus fertiles. De même, le boisement artificiel conduit à une dégradation et une destruction progressive des pelouses.


État actuel de conservation


Ces prairies présentent une forte originalité (contact terrains siliceux / terrains sédimentaires) et d'im-portantes potentialités biologiques masquées aujourd'hui par leur mauvais entretien.

Menaces potentielles, facteurs de dégradation


L’habitat disparaît progressivement depuis le début du XXème siècle, avec une accélération très forte depuis 1960. Les raisons sont multiples : abandon pastoral et reconstitution de boisements (en moins d'un demi-siècle dans certains cas), plantation massive de résineux (généralement le Pin d'Autriche), transformation agricole en prairie intensive, ouverture et extension de carrières…
Le maintien des pelouses sèches semi-naturelles est souvent précaire dans le cadre d'exploitations agricoles herbagères semi-intensives par bovins ou dans le cadre d’une gestion conservatoire et agro-environnementale.

Orientations optimales de gestion

(d’après le Muséum National d’Histoire naturelle)
Le maintien d’une population adéquate de petits brouteurs (lapins et lièvres), avec adaptation de la pression cynégétique à un niveau convenable par des aménagements cynégétiques (vaccinations, garennes), est favorable aux zones de pelouses les plus rases. Elle est moins efficace sur les pelouses trop envahies par les graminées telles que le Brachypode et le Brome.
Il est souhaitable d’envisager une méthode de gestion agropastorale du milieu pour maintenir la strate herbacée : élimination sélective des espèces allochtones et pâturage ovin extensif pour assurer le maintien de l’ouverture du milieu, avec interventions mécaniques régulières (fauche), si possible.
Dans tous les cas, une exportation des produits est indispensable, soit par pâturage, soit par fauche.
La gestion par le pâturage extensif par des ovins, voire par des bovins, caprins et équins de race rustique, permet le maintien d’une couverture herbacée et la maîtrise voire l’élimination des rejets, avec un plafond de chargement moyen de l’ordre de 0,7 UGB/ha. Les caprins peuvent être associés efficacement aux autres espèces pâturantes pour limiter l’extension et la repousse des ligneux.
Dans les secteurs envahis par le Brachypode ou le Brome qui tendent à banaliser et à appauvrir la végétation, la réalisation d’une fauche en juillet et en septembre peut s’avérer nécessaire. On pourra conserver quelques feuillus présents sur l’habitat afin de préserver l’entomofaune et l’avifaune qu’ils abritent.
L’éradication mécanique ou chimique reste envisageable dans des conditions qui restent à préciser localement.
La technique du brûlis pourrait être retenue pour la remise en état des sites présentant une litière accumulée importante, en prenant toutes les précautions nécessaires pour éviter la destruction de la faune.